L'analyse à venir est relativement longue et je remercie le lecteur patient qui aura eu le courage de la lire entièrement.
Les habitués de Movies Chronicle (que j'espère toujours nombreux!) auront certainement compris à la vue des dernières parutions que sur ce site nous sommes, mes deux compagnons rédacteurs et moi même, plutôt gaga devant les oeuvres de Zack Snyder.
Suites aux critiques intéressantes et pertinentes de mes chers collègues, dont certains des éléments qu'ils abordent feront d'ailleurs retour dans la présente analyse, je me propose à mon tour de poursuivre leur travail et de me pencher sur le cas Snyder. Il le mérite bien et son dernier coup de maitre aussi.
Y'a t'il un style Snyder? Voilà la question sur laquelle je vais me pencher. Cela en profitant de la sortie de Sucker Punch pour tisser des parallèles, jeter des ponts entre les films et les confronter les uns aux autres. Le but étant moins d'apporter les réponses (prétendre les avoir serait mentir) que de soulever les questions en attirant l'attention sur certaines récurrences formelles et thématiques. Libre à chacun d'interpréter comme il le souhaite.
Je rappelle que Snyder a jusqu'à présent réalisé cinq films (dans l'ordre chronologique: L'armée des Morts (Dawn of the Dead 2003), 300 (2007), Watchmen (2009), LeRoyaume de Ga'hoole (Legend of the Guardians: the owl of Ga'hoole 2010) et Sucker Punch). Celui-ci est donc au début d'une carrière déjà culte et hors norme qui promet à n'en pas douter encore de grandioses surprises.
Tout d'abord précisons que par « style » je n'entends pas seulement parler de l'aspect visuel des oeuvres mais aussi des aspects thématiques récurrents. C'est en effet bien à cela que l'on reconnaît un « auteur » (concept décrié s'il en est, et non sans raison d'ailleurs, mais, qu'y puis je, j'aime la force qui s'en dégage.). La singularité d'un cinéaste, sa « vision du monde » si l'on préfère, se dégage autant de la forme que du fond.
D'où le fait qu'il faille répondre aux petits rigolos taxant trop rapidement (comme souvent hélas) Snyder comme cinéaste « formaliste », faisant sonner ce terme de manière péjorative (là où il n'a nul raison de l'être). Comme s'il y'avait un goût chez Snyder de l'effet de style qui ne vaudrait que pour lui même, qui ne véhiculerait aucun sens autre que celui d'être à la rigueur fun, tripant (ce qu'il est par ailleurs.). A ces gens là je leur répondrai joyeusement qu'ils devraient selon moi essayer de voir un peu plus loin que le bout de leur nez!
Car effectivement ils ont raison, non pas dans leur interprétation (formalisme= gratuité= nullité.) mais uniquement dans leur constatation (même s'ils n'ont, il faut le dire, aucun mérite, car cela se voit comme le nez au milieu de la figure que Snyder est un amoureux de la plastique de l'image, de la forme et des plans stylisés.)
Reste alors l'interprétation que l'on peut donner à ce goût, certains n'y verront que stylisation outrancière et gratuite, et c'est leur droit, qu'ils arrêtent seulement de critiquer à tout va, d'autres qui vivront ces instants comme de pures moments de jouissances essaieront peut être de chercher pourquoi il y'a ce goût ultra-prononcé chez le cinéaste en faveur des moments de pure sidération devant la puissance visuelle de l'image.
Le problème, pour le résumer, est que certains ont fait du formalisme et de la stylisation visuelle forte dont est friand Snyder la finalité de son cinéma, lui donnant ainsi un caractère stérile et vide de sens. Grave erreur! A mes yeux ce n'est non pas comme finalité de son cinéma qu'il faut interpréter ce goût du cinéaste mais bien comme la base essentielle, le point de départ et le point d'orgue de ses oeuvres sur lesquelles viennent se greffer et s'incarner ses grands thèmes narratifs, moraux, spirituels...
Les films de Snyder véhiculent, à mes yeux, une conception de la vie et du monde que je définirai comme « joyeusement triste ». Je m'explique. Ils se terminent par exemple le plus généralement sur une ambiguité qui donne à réfléchir. Prenons L'armée des Morts, à la fin du film les rares survivants s'enfuient en bateau pour échapper aux morts vivants. Tout semblerait donc bien se terminer pour eux. Mais le générique final est entrecoupé d'images en super huit prises avec une caméra trouvée sur le bateau nous donnant à voir par intermittence la suite du récit. Le happy end est alors totalement rejeté au loin. En effet où aller maintenant pour les survivants? Est il encore possible de trouver un coin de terre non infesté? Si l'espoir subsiste, ce n'est que très peu de temps. En effet les survivants accostent sur une île mais uniquement pour être attaqués immédiatement. La caméra tombe alors à terre tandis que des visages de zombies dégueulasses, qui apparaissent par intermittence à l'écran, sont tout ce qui reste au sein du cadre donc du monde filmique.
Pareil en ce qui concerne Watchmen et son superbe twist final où le mince espoir de paix universel rêvé par Adrian, et payé au prix fort, risque de voler en éclat par la faute du journal de Rorschach, arrivé entre les mains de la presse, et révélant le complot dont a été victime le monde. Tout va alors recommencer, la paix est plus que précaire et le péril atomique ressurgit. Sans parler de la fin de Sucker Punch que je tairai ici mais qui a toutes les apparences du faux happy end fantasmé (voir la critique de Thomas K). Bref le pôle pessimiste pointe toujours le bout de son nez chez le cinéaste. Rien n'est jamais acquis et certainement pas le bonheur et la sureté des personnages.
Sucker Punch livre clairement la clef pour éclairer cette idée: si le bonheur n'est jamais acquis c'est bien que tout reste toujours à faire. La vie chez Snyder elle ne tient qu'en un seul mot. C'est le dernier mot prononcé dans Sucker Punch par Sweet Pea en voix off sur un écran noir dans une adresse directe au spectateur: « FIGHT ».
La vie au sein des films de Snyder est un combat permanent. Il faut, pour le Héros Snyderien, foncer tête baissée vers les périls à venir. La fin du Royaume de Ga'hoole dit à ce titre déjà tout. Le vieux guerrier annonce qu'une tempête se prépare et prend son envol
Le grand ennemi des Héros snyderien est, découlant de cela, l'immobilisme et la rigidité. Etre immobile cela renvoie évidemment à la rigidité cadavérique du mort, à celui qui a cessé de se battre, tel Moloch, dans Watchmen, que Rorschasch trouve assis, immobile car assassiné tandis que sa cigarette fume encore et que les cendres se sont accumulées. C'est par là même chez Snyder être en position de faiblesse, être vulnérable et dominé: Ainsi dans Sucker Punch les protagonistes, fascinés par les danses de Baby Doll sont figés, presque pétrifiés par le corps de celle-ci.
L'être humain risque de perdre son âme, sa singularité et le risque est de se changer en instrument vide et asservi. D'où le goût profond du cinéaste pour déshumaniser les ennemis qu'affrontent ses Héros. Dans Sucker Punch la Team de rêve affronte des robots, et des soldats allemands dont un masque à oxygène recouvre le visage les rendant ainsi quasi-monstrueux. Dans 300 la garde personnel de l'empereur Xersès prénommée « Les Immortels » portent un masque d'argent. Le Grand méchant du Royaume de Ga'hoole est une chouette portant un casque cachant sa laideur et sa défiguration.
Reste le cas Watchmen où les masques jouent évidemment un rôle essentiel et ambigu soulignant l'ambivalence des Héros qui ne sont pas des super Héros: ils ne possèdent pas de super pouvoir, excepté Adrian et le Dr Manhattan, et ces deux personnages sont d'ailleurs les moins humains de tous, les plus dénué de compassion. Ils sont presque passés de l'autre coté, du coté de la machine qui calcule les risques et ce n'est donc pas innocent si Adrian est le grand maitre qui échafaude le plan diabolique du film en se servant justement de l'énergie surhumaine du Dr Manhattan, chez qui il reste certes encore une part d'humanité mais celle-ci tend à se résorber. Les individus tués et détruits chez Snyder sont la plupart du temps des être chez qui l'humanité est en train de disparaitre ou a disparu et qui se rapprochent plus de l'inhumain, du monstre, du difforme, et de l'anormal. Cela se vérifie de manière frappante dans Sucker Punch où un des soldats allemands perds son masque à oxygène laissant apparaitre un visage humain. Baby Doll qui dézingue tout ce qui bouge et aurait l'occasion de le supprimer (surtout qu'il transporte la carte recherchée) ne le fait pas et l'épargne. Comme si la preuve faite de l'humanité du personnage empêchait le geste de suppression de Baby Doll alors qu'à l'inverse au début de la séquence le vieillard qui les briefe avant chaque "mission" leur lance "N'ayez pas peur de les tuer... Ils sont déjà morts." Tout est dit.
A l'opposé d'Adrian et du Dr Manhattan il y'a Rorschasch et le Comédien, individus instables, passionnels, acharnés et incontrôlables car débordant d'énergie. Eux sont humain plus qu'humain! Et notre sympathie va directement vers eux malgré leur ambiguité morale. Il faut les voir crier, hurler, pleurer même car eux ont compris, ils ont vu le vrai visage de l'humanité, celle sous le masque et ils ne peuvent pas s'en remettre : ils n'y ont trouvé aucune morale, que la cruauté et la laideur tel les visages des « Immortels » de 300. Rien à sauver, pas de destin ou de bonheur à atteindre juste un simulacre d'ordre et de rigueur (la rigueur du robot) dissimulant le chaos qui menace de poindre à chaque instant. L'histoire humaine est fondé sur les morts, jalonnée de meurtres et de sacrifices nécessaires à la survie de l'humanité tel celui des spartiates ou celui de Rorschasch qui, à la fin de Watchmen dans une des plus belles séquences du film, enlève volontairement son masque et revendique une dernière fois sa nature humaine, violente, pulsionnelle, mais aussi touchante, car imparfaite, en face du trop parfait Dr Manhattan qui peut tout changer sauf, et il le dit, cette « nature humaine » qui pose problème. Elle le dépasse: à la fois terrible, mystérieuse, et incontrôlable.
Il n'y a ni destin, ni but véritable chez Snyder (Le Royaume de Ga'hoole est l'exception à ce constat même si le film travaille aussi autour de l'idée des fantasmes mythiques improbables et incroyables comme dans Sucker Punch où l'idée de but et l'idée d'une destinée sont des valeurs crées de toutes pièces par l'être humain et ses fantasmes et ne sont en aucun cas volonté divine ou message de la providence.). L'absurdité du monde et de l'homme tend à s'affirmer: « Rien ne finit, rien ne finit jamais » dit d'ailleurs Laurie au Hibou à la fin de Watchmen. Le monde est « éternel devenir » sans cause et sans finalité, tout recommence en prenant des formes différentes. « It's a joke, a big joke » dit le comédien en pleurant au chevet de Moloch, son pire ennemi. Pas de bien et de mal, pas de moral. Le Comédien est autant celui qui combat Moloch que celui qui exécuta Kennedy le 22 novembre 1963 comme on peut le voir dans le générique de début. Il n'y a pas de valeurs fixes et il n'y a plus vraiment de sens.
Voilà pour la tristesse qui se dégage du cinéma de Snyder mais la conception joyeusement triste s'affirme. Snyder pratique un cinéma du pied de nez en direction du spectateur, et instaure une subtile distanciation dans tous ses films, nous arrachant parfois un sourire là où il y'aurait lieu de pleurer. Ainsi les restes sanglants de Rorschach
Snyder fait un cinéma où l'artifice et l'irréalisme vidéoludique côtoie la cruauté et l'hyper réalisme de la violence. Il mélange et dynamite les genres, se fout de l'anachronisme. Watchmen pourrait presque être un film noir des années 40 (la pluie, la voix off, les flash back, les frontières douteuses entre bien et mal et le personnage de Rorschach, clone bogartien tout droit sorti du Grand Sommeil de Hawks) mais il est aussi un film de super héros, un film de science fiction (voyage sur Mars) et évidemment un grand film d'action. Quand à Sucker Punch inutile d'en parler il faut plutôt lire la critique de Clément qui approfondit parfaitement l'idée.
Bref, le cinéaste mélange, retravaille, modifie sans jamais effacer le modèle. C'est ce que montre par exemple le très beau travail effectué sur la musique dans Sucker Punch où les morceaux sont modifiés, remixés et se présentent à l'oreille en mêlant la saveur exquise du "déjà entendu" et celle surprenante de la nouveauté.
Il y'a aussi ce goût ultra prononcé chez le cinéaste pour le typage fort et expressif, presque Eisensteinien (voir La Grève), de ses personnages. Il faut voir la tête de Nixon dans Watchmen, celle de l'immonde cuisinier (il faudrait se pencher sur le rapport à la nourriture chez le cinéaste par ailleurs...) ou du maire abjecte dans Sucker Punch. Les méchants sont physiquements repoussants. Leurs physiques deviennent reflets de leurs cruautés, de leurs ressentiments et de leurs faiblesses tel le bossu de 300. Les visages putréfiés et difformes abondent tel celui du chef allemand dans Sucker Punch, ou ceux des zombies de L'armée des Morts évidemment. La dégradation de la chaire devient symbole de la dégradation de l'âme. Le devenir-cadavre attend tous les individus (Rorschasch symboliquement brûle le visage d'un prisonnier à l'huile bouillante).
Pour les Héros il s'agit alors de lutter, de repousser l'échéance. La scène d'action, le combat devient l'acte affirmateur de la vie. Ce principe est poussé à sa limite avec Sucker Punch où jamais la gratuité apparente des séquences de combat n'a autant sauté aux yeux. Les séquences de combat sont juste un substitut, un clou quasi autonome et spectaculaire ne faisant non pas avancer foncièrement le récit vers sa résolution mais lui permettant paradoxalement de survivre encore un peu. Sans cette capacité de Baby Doll à puiser en elle les ressources de danser, donc de lutter -ce qui se matérialise à l'écran par les combats- le récit ne pourrait exister, il n'y aurait que la lobotomisation.
Le mouvement est ainsi ce qui est toujours recherché par le cinéaste comme contrepoint à la rigidité mécanique du zombie ou du cadavre. Ainsi fonctionne Sucker Punch: immobilisée sur une chaise, prête à être lobotomisée, Baby Doll s'échappe dans ses fantasmes. Les corps qui sautent, virevoltent, frappent, exercent une véritable fascination pour Snyder. Si les combats et les séquences d'action remplacent les danses de Baby Doll c'est car l'affrontement, la vie comme combat, est l'essence même des oeuvre du cinéaste. La scène d'action est Danse (voir la critique de Clément sur l'aspect chorégraphique de ces séquences), ballet, et symbolise l'état d'esprit des personnages et la puissance de leurs convictions. Combattre c'est encore se sentir en vie pour les Héros qui ne se rendent et n'abdiquent jamais tel Rorschach dans Watchmen qui, cerné par la police, tente quand même sa chance et fini immobilisé à terre.
D'où, découlant aussi de cela, l'usage du ralenti (la grande marque de fabrique du cinéaste), qui me semble posséder une valeur inverse à celle véhiculer par exemple chez Peckinpah dans son usage récurent du procédé. Chez Peckinpah le ralenti incarne le devenir-mort du personnage, sa chute, une vie qui s'arrête tout comme l'image symboliquement dans le ralenti tendrait à se figer.
Chez Snyder le ralenti est puissance de vie, affirmation du corps, de sa grâce et de son rayonnement. Le cinéaste flirte dangereusement avec l'immobilisme (qui est le ralenti arrivé à son terme) pour mieux souligner la victoire du mouvement qui appelle paradoxalement le procédé formel, le réclame et montre ainsi cette valse dangereuse mais excitante des personnages avec l'immobilisme/ la mort que vient incarner le ralenti. Cela dans le but de souligner que c'est au plus près du danger et de la mort que ses personnages se sentiront le plus en vie.
Le ralenti intervient ainsi majoritairement dans les scènes d'action et de combat pour sidérer et mettre en avant la beauté du geste dans sa préparation et son exécution. Il tend à immortaliser le geste pour l'éternité et à augmenter la puissance d'impact qu'aura par exemple un coup de sabre ou d'épée. Dans ce cas précis il renforce le déchainement énergétique à venir en le retenant au maximum avant de le libérer dans des plans défouloir et jouissif présents dans toutes les oeuvres.
Les Héros chez Snyder ont besoin de se défouler, de dépenser leur énergie et d'assouvir leurs pulsions trop longtemps contenues, bref de se libérer (autre grand thème de Sucker Punch: conquérir sa liberté). Pulsions qui s'incarnent dans ce désir destructeur de tout faire partir en fumée, de tout faire « péter ».Les motifs visuels du feu et des explosions gigantesques sont ainsi présents dans tous les films: à la fin du générique de début de Watchmen un personnage allume un cocktail molotov, le lance et fait tout exploser, seul subsiste un torrent de feu et tout disparaît alors que rien n'a encore commencer. Dans Sucker Punch Snyder reprend le même geste, à la fin cette fois, lorsque Baby Doll lance un cocktail molotov pour faire brûler le bordel/asile pour créer une diversion et sur la bouteille qu'elle utilise (que nous avions déjà vu à coté de Sweet Pea plus tôt dans le film) le spectateur attentif remarquera qu'il est écrit "Paradise", mot qui se trouve sur l'affiche à droite du cadre dans le tout dernier plan du film. Le paradis snyderien se mêle à l'idée de l'enfer (les flammes, l'expiation des péchés) dans un mélange qui dynamite toutes les valeurs classiques. Le Comédien a quand à lui recours au lance flamme, Rorschach gratte des allumettes pour bruler avec une bouteille de spray les polic
Le style du cinéaste est donc, pardonnez moi l'expression, littéralement explosif. Pourquoi? Cela tient à la nature de ses Héros. Dans cette volonté de brûler et de consommer littéralement l'énergie il y'a le sursaut de la vie luttant pour s'imposer, volonté de puissance pure et belle car elle est avant tout puissance de la volonté (Sucker Punch n'est finalement rien d'autre que cet effort magistral pour s'en sortir, s'évader, se forcer à danser en libérant cette volonté de puissance primaire qu'incarne les scènes d'action fantasmées de Baby Doll). Aucun compromis tel est le crédo des personnages de Snyder (Léonidas refuse de négocier dans 300, tout comme Rorschasch ou Baby Doll.).
Les Héros de Snyder sont presque dionysiaques au sens Nietzschéen du terme: ils sont caractérisés par un trop plein de force. Dans L'armée des morts les personnages s'amusent à désigner à un sniper un zombie à leur pied leur faisant penser à une célébrité. Celui ci leur éclate alors littéralement la tête. L'image est forte et possède un caractère choquant moralement. Impossible en effet de faire l'impasse sur le fait qu'il y'a eu un être humain derrière le zombie.L'aspect comique du moment aussi est important et apporte un contre point dissonant à la situation désespérée des personnages renforçant l'idée de cette conception dionysiaque « joyeusement triste » du monde.
L'homme est cruel chez Snyder, c'est un fait, il aime la violence et le sang. D'où le fait que l'on ait pu critiquer de manière superficielle l'idéologie véhiculée par des films comme 300 ou Watchmen. Snyder est au contraire génial car il nous met face à face avec la nature humaine profonde, la vérité viscérale de l'être humain, la vérité terre à terre, celle où il n'y a plus de belles valeurs morales qui tiennent, où les frontières du bien et du mal sont poreuses et se brouillent et où seul subsistent des individus luttant pour conserver et affirmer leur part terrible d'humanité.
Pour Nietzsche vouloir revient à créer. L'homme est profondément artiste et l'Artiste avec un grand A est la figure ultime nietzschéenne, l'esprit libre, celui qui affirme le pouvoir des apparences et de la création, qui recherche l'ivresse dionysiaque, qui se tient sans peur face au chaos du monde. Découlant alors de cela il faudrait rajouter le concept deleuzien qui affirmait que créer c'est résister. Tout est là, les Héros de Snyder résistent et Baby Doll devient alors la figure emblématique parfaite de ce principe. Sa volonté, constituée par la pulsion dominante de vie, appelle la création imaginaire du fantasme qui permet de résister au réel insupportable et d'atteindre la liberté. Cette liberté que Nietzsche décrivait comme « quelque chose qu'à la fois on a et on n'a pas, que l'on veut, que l'on conquiert... ».
Et, à travers Baby Doll celui que l'on aperçoit c'est bien Snyder et sa conception d'un cinéma libre, marquant, situé par delà bien et mal dans le but d'ausculter sans complexe, sans "crainte", les tréfonds de la nature humaine.
Pierre Andrieux
Oh oui !
RépondreSupprimerIl ne faut pas chercher Monsieur Andrieux ; nous avons excité la bête avec les parties 1 et 2 du dossier Sucker Punch et voilà qu'elle nous pond une synthèse de l'oeuvre Snyder tout à fait enthousiasmante !
RépondreSupprimerMerci et Bravo cher collègue.
(oui bon ça va hein on a bien le droit de s'envoyer des fleurs entre nous de temps en temps, c'est pas comme si on avait des hordes de fans hystériques en bikini qui se jetaient sur nous dés qu'on posait le pied dehors).
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Excellente synthèse de l'oeuvre de Snyder... je me lance de ce pas dans une seconde lecture.
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