lundi 10 janvier 2011

Tron : Legacy


Clu: End of Line, man.


Tron revient. 29 ans après un premier opus considéré par beaucoup comme une œuvre pionnière, avant gardiste et forcement culte, le studio Disney met le bouchées doubles pour nous offrir un film à la pointe de la technologie informatique.
Comme ce fut le cas en 1982, Tron se devait de faire date à nouveau en matière de technologie et de design cinématographique. Par ailleurs, le défi est de fidéliser dans un même mouvement un public large avec une histoire qui, dans le fond, trouve naturellement sa place dans un cinéma hollywoodien qui travaille depuis quelques temps déjà les jeux de basculement entre les mondes, les réalités alternatives, en vue d'interroger le réel (Avatar 2009, Inception, Shutter Island ou encore Raiponce 2010 hérite finalement du leg du Magicien d'Oz 1939).

Convié à la projection presse, j"ai pu voir le film un mois à l'avance et dans les meilleurs conditions possibles (écran Imax 3D et qualités sonores optimales du Pathé Quai d'Ivry), le minimum requis pour une œuvre qui se regarde et s'écoute...au maximum.
Tron : Legacy a pour ambition de nous faire découvrir un monde numérique crée de toutes pièces par un homme (Kevin Flynn) jouant les dieux créateurs et pervertit par les imperfections de sa propre humanité, transformant alors son Eden en un enfer manichéen. Un dualisme qui oppose la perfection numérique aux failles humaines de manière classique mais surtout obscure voir illisible.
La rédemption viendra du fils (Sam Flynn) qui plongera à son tour dans le monde du père. Il sera notre référent, un guide un peu froid et triste pour un film sombre et impressionnant mais pourtant orphelin d'un regard de cinéaste inspiré.

Tron est avant tout une magistrale performance technique et artistique, tant au niveau du design sonore que de la composition picturale. Cohérence et élégance sont ici les maitres mots pour traduire toute la beauté des courbes du décors. Une beauté froide qui structurent les costumes, vaisseaux et bâtiments. Le tout fascine l'œil et grâce à une profondeur de champ démultipliée par la technologie Imax, l'ampleur physique de la Grille (The Greed) s'étend en des lignes infinies.
Moins abstrait que dans le premier opus, dont Tron : Legacy est clairement un remake autant qu'une suite, l'esthétique du film, entre symétrie autoritaires et pureté des courbes, opère d'une fusion entre les deux dominantes picturales des Trilogies Star Wars tout en se détachement nettement de son modèle par une palette de couleurs épurées à l'extrême.
la beauté plastique de Tron est de loin la plus grande réussite du film et tient toutes ses promesses, appuyé par un design sonore immersif et tonitruant. La musique des Daft Punk s'y mêle subtilité et affirmation, enrichissant totalement l'univers du film d'une dimension épique et dramatique bienvenue. Dans notre article sur la bande originale de Tron : Legacy (Décembre 2010) nous rappelions que la musique de film restait indissociable des images, sous peine de perdre de sa puissance. Dans le cas de Tron, c'est malheureusement les images qui ont grandement besoin de cet accompagnement narratif de par sa capacité à rehausser considérablement la dimension dramatique du film.

Car ce qui manque à Tron : Legacy, c'est, on l'a dit, un regard de cinéaste, un réalisateur capable d'investir le spectateur dans ce monde qui ne demande qu'a être exploré et compris plutôt que superficiellement survolé. Kosinski est à coup sûr un excellent plasticien à défaut d'être un conteur d'histoires. Non seulement la narration manque sérieusement de dynamisme et pèche par des dialogues convenus, mais surtout, le découpage des scènes d'action est trop souvent formaté et laisse le spectateur sur son siège plutôt que de l'embarquer avec lui.
Les plus belles idées du film sont alors concentrés dans la superbe séquence des jeux de stades où le rendu visuelle des décors, à la limite de l'abstraction (incroyable mécanisme des cages modulables) combiné à une mise en scène qui abolit les lois de la gravité nous entraine avec fureur dans un déluge de lumière et d'infra-basses. De même pour la séquence des cycles qui suit presque immédiatement le combat de disques. L'action y est épurée au point de ne devenir que lignes, trajectoires et enchevêtrement de formes abstraites. On notera également un beau sursaut final accompagné même d'un peu de poésie en guise de dernier plan que vous jugerez par vous même.

Pour le reste, le découpage est le plus souvent décevant sans être non plus catastrophique. La frustration vient du fait que tout semblait réunit pour faire un grand film. Ce fameux découpage empêche surtout l'immersion physique heureusement compensée par l'architecture musicale et sonore ainsi que les effets stéréoscopiques (3D exemplaire).
L'une des plus belles séquences reste alors ce plan d'introduction majestueux qui nous fait raser les building en décadrage vertical avant de dévoiler par un effet de surgissement le titre du film adossé au dos d'une tour de verre. Vitesse, profondeur, vibrations. Tout était pourtant là !
Il n'est reste pas moins un film à voir et surtout à voir en salle, car Tron : Legacy n'a pas été pensé pour autre chose que pour un écran de cinéma.

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