samedi 4 juin 2011

X Men First Class Matthew Vaughn : Xavier ou Magneto?


Dure, dure de s'attaquer à la mythologie X Men... après le déplorable X Men L'Affrontement final (2005) et le plutôt fade X Men origins Wolwerine (2009) une certaine appréhension était présente vis à vis de ce dernier opus se proposant de plonger aux origines de la franchise et de nous dévoiler les dessous de la rivalité Xavier/Magneto.


Ce qui venait tout de même contrebalancer cette appréhension était le retour du grand Bryan Singer, réalisateur des deux premiers films, cette fois à la production, et surtout la présence à la réalisation du génial Matthew Vaughn. Vaughn, dont c'est seulement le quatrième film, incarne selon nous, au même titre qu'un cinéaste comme Zach Snyder, dont il fut beaucoup question sur ce blog, une valeur sure qui parvient à faire briller d'une lueur d'espoir l'avenir du cinéma hollywoodien (les Spielberg and co commencent hélas à se faire vieux).

Le genre du film de super-héros n'était pas un terrain inconnu pour le cinéaste du génial Kick-Ass qui revisitait avec ce film les codes du genre et livrait une oeuvre délirante et jouissive. Avec Star Dust, son film précédent Kick Ass, c'était l'univers du conte et du merveilleux qui était cette fois sujet à un regard neuf. Bref, ce qui ressort de ces quelques lignes c'est que le cinéaste semble s'épanouir au sein de genre particulièrement codé et réglé et leur injecte une nouveauté, une fraicheur dans le ton comme dans les personnages (le Héros Vaughnien est définitivement le pré-adulte au grand coeur, un peu gauche et un peu looser sur les bords) particulièrement appréciable. Il y'a toujours chez Vaughn ce léger décalage, ce subtil second degré qui écarte ses films de la parodie débilitante et lourdingue et les préserve de la grandiloquence et du ridicule d'un parfois trop grand sérieux propre à ces films. On est toujours à la limite du Kitsch, du ridicule chez Vaughn et cela précisément car c'est bien ce que le cinéaste recherche consciemment. Il joue avec les clichés, les retourne, s'en amuse et porte au final un regard décomplexé mais jamais moqueur ou cruel sur ces univers fortement stéréotypés. Le Capitaine Shakespeare dans Star Dust en était l'exemple type.

Avec X Men qu'on se le dise d'emblée Vaughn, s'il ne rejette pas du tout l'humour (et tant mieux), laisse tout de même au vestiaire ses velléités satiriques. Le poids de la franchise est assumé avec sérieux (le coté Singer?) mais aussi avec légèreté et Vaughn livre tout simplement à nos yeux le meilleur film X Men. La patte du cinéaste se retrouve dans le goût pour les jeunes X Men débutants et maladroits devant se former et conquérir leurs statuts de véritables Héros (tel Tristan dans Star Dust ou Dave dans Kick-Ass). Le choix de James Mac Avoy (déjà vu dans le réjouissant Wanted Choisis ton Destin) pour incarner Xavier est particulièrement judicieux et l'acteur est parfaitement dans la lignée des Aaron Johnson (Kick-Ass) et Charlie Cox (Star Dust) avec leurs têtes de jeunes premiers naïfs et fragiles.

C'est bien cette naïveté des héros Vaughniens qui se doit d'être soulignée et marque un héritage classique à l'oeuvre chez le cinéaste. Dave, Tristan ou Xavier sont de pures chevaliers du bien. Leur moralité est irréprochable et tous le problème de films comme Kick Ass ou Star Dust est bien cette difficulté qu'ils ont d'agir et de trouver leur place au sein du monde dans lequel ils évoluent. A la fin de Star Dust Tristan devient roi du royaume merveilleux bordant notre monde quotidien et quitte donc définitivement ce dernier. L'anachronisme des personnages est flagrant, ils croient encore en des valeurs obsolètes. Avec X Men et la relation Xavier/Magneto on sera alors au coeur de ce problème. Soit deux héros complètement opposés: le vaughnien Xavier, le singerien Magneto ( la fascination, chez Singer, pour les figures du mal (les nazis surtout) ou les individus profondément ambivalents est particulièrement frappante: voir le culte Usual Suspects et Keyser Soze, Walkyrie, ou encore Un Elève doué et le personnage interprété par Ian McKellen, lui même interprète de Magneto dans les deux premiers X Men).

Notre empathie qui va autant (voir plus) du coté de Magneto que de Xavier, nous pousse à nous interroger: de quelle coté se situer: Xavier ou Magneto? Une séquence du film est particulièrement frappante et signifie parfaitement l'ambition du film de Vaughn. Les deux héros discutent tout en jouant leur sempiternel et symbolique partie d'échec, ils sont au pied du Memorial Lincoln de Washington apparaissant dans la profondeur de champ. Une aura sacrée est conférée au moment. La figure lincolnienne ancre l'instant du coté du classicisme et convoque les références cinéphiliques de Mr Smith au Sénat de Capra à JFK de Stone en passant par Vers sa Destinée de Ford.

Elle donne aussi au film de Vaughn le statut du récit mythique racontant, par définition, une histoire sacrée étant advenue au temps des commencements, c'est à dire narrant la naissance, la venue au monde de quelque chose. Le film de Vaughn a pleinement valeur de récit mythique car il met en scène la naissance des X Men et ses deux héros Xavier et Magneto incarnent en fait les deux faces d'une même pièce: celle de la figure matricielle lincolnienne à la fois destructrice/créatrice ( Lincoln est à l'origine de la guerre civile (destructeur) et de la naissance d'une nouvelle nation (créateur) et l'ambition de Magneto est bien d'assoir l'avènement des mutants (créateur) et d'annihiler la race humaine inférieure (destructeur)) et d'autre part préservatrice/exécutante ( Lincoln est l'incarnation de l'idéal démocratique américain et perpétue les grandes valeurs morales du pays (courage, altruisme, discernement) ce que représente parfaitement Xavier), en Lincoln les opposés se résorbent, et celui-ci incarne à lui seul la devise du grand sceau américain « E pluribus unum » (un à partir de plusieurs).

La représentation lincolnienne chez John Ford et D W Griffith a particulièrement joué à accentuer et à connoter ces aspects du personnage faisant de la figure historique, une véritable figure mythique. A partir d'elle c'est tout le Héros hollywoodien qui se construit et qui en découle, ce jusqu'à nos Xavier et Magneto. La bipolarité de la figure héroique (car Xavier autant que Magneto sont les Héros) est donc le grand intérêt du film de Vaughn et les deux acteurs, Fassbender et MacAvoy, sont superbement antinomiques et se complètent parfaitement.

Le seul « chichi » que l'on pourrait se permettre serait de regretter que Vaughn laisse légèrement son style de coté ce qui fait d'X Men First Class un film à la réalisation certes parfaite (la dimension épique et le spectaculaire fascinant n'ont rien à envier à X Men 2 et la très bonne lisibilité ainsi que la grande qualité des scènes d'actions sont à noter et sont dans la lignée de celles, superbes, de Kick Ass et Star Dust) mais sans grande prise de risque, voir sans grande personnalité si l'on voulait être méchant. Pour avoir revu Thor de Brannagh juste après la différence est immédiatement perceptible. Brannagh apporte clairement un style formel précis à son film là où cela s'avère plus difficile à discerner chez Vaughn.

Mais ne boudons pas notre plaisir. A l'heure de la prolifération effrayante des films, bons ou mauvais, de super-héros, X Men First Class se situe clairement dans le peloton de tête et va sans doute permettre à Vaughn d'être définitivement « bankable » sur la planète Hollywood. Ce qui, on s'en doute, ne peut que nous réjouir et laisse présager un bel avenir à ce cinéaste dont le nom est à retenir et les films à voir, si ce n'est pas déjà fait.

Pierre Andrieux

1 commentaire:

  1. J'ai vraiment adoré le film, du coup comme j’avais une critique de prévu je la poste !

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